J’aime faire visiter une cathédrale, une grande basilique à des enfants, notamment des enfants de la catéchèse. Leurs yeux sont émerveillés par les dimensions du bâtiment, cette voûte très haute qui représente le ciel, ces colonnes élancées qui soutiennent la voûte et qui élèvent le regard. Et puis, il y a ces vitraux qui illuminent l’église de mille couleurs. Alors, ils regardent aussi les statues qui ont parfois la taille d’un être humain et qui paraissent si impressionnantes. Certes, tout cet édifice est construit pour élever les cœurs vers Dieu et pour favoriser la vie intérieure. Et pourtant j’aime, après, avec les enfants, leur faire découvrir que ce n’est pas là, la maison que Dieu préfère. La demeure qu’il préfère, c’est le cœur humain. Saint Paul l’affirmait très clairement auprès des chrétiens de Corinthe. Il leur disait : « Le sanctuaire de Dieu est Saint et ce sanctuaire c’est vous ». Et cela touche les enfants, notamment lorsqu’ils se préparent à la première communion. Ils sont la demeure que Dieu préfère. Quand Bernadette est allée trouver le curé Peyramale pour lui faire, comme elle disait, sa commission, il ne s’agissait pas de cathédrales mais simplement d’une chapelle demandée par la « belle dame » à l’endroit dit de « Massabielle ». Pour le curé dubitatif sur les événements, la demande était, pour le moins, incongrue. Il disposait, au centre de Lourdes, d’une église digne de ce nom et aller construire une chapelle dans ce lieu escarpé et un peu « mal famé » paraissait vraiment une idée saugrenue. Aujourd’hui, quand vous entrez dans les sanctuaires, on était éblouis par les basiliques. Et pourtant on est surpris de voir que tous les pèlerins convergent, et contournent la basilique, pour se rendre ici, dans l’humble grotte, cette grotte qui est le lieu où tout s’est joué. Ce lieu où Marie a conduit Bernadette vers la véritable source : le Christ, son Fils, le Seigneur. Cette source qui coule en abondance dans le cœur de tous les baptisés ! Cette source qui coule même dans le cœur de cette petite fille, Soubirous, qui est souvent raillée, moquée et qui n’a même pas eu l’occasion de faire sa première communion ! Aujourd’hui, lorsque nous regardons cette grotte, nous voyons aussi qu’elle sert de fondation à la basilique qui la surplombe et qui est la réponse à la demande de la « belle dame ». Mais pour le croyant, elle est bien plus que la fondation d’un édifice, fait de matériaux en dur, elle est le signe des fondations de l’église, faite de pierres vivantes. Cette église faite d’hommes et de femmes, cette église édifiée sur la pierre angulaire qu’est le Christ lui-même. Tous les pèlerins qui viennent ici vont, alors, se ressourcer, eux aussi, à la source vivifiante du Christ vivant. Ils savent qu’ils sont appelés à être ensemble, en Église, le corps du Christ vivant au cœur du monde. Leur mission est là. Chacun reçoit une mission. Nous sommes membres du Corps du Christ mais nous pouvons nous demander lequel nous sommes invités à être. Sommes-nous appelés à être l’oreille attentive à ceux qui ont besoin de déverser ce qui est trop lourd sur leur cœur ? Sommes-nous invités à être ce regard bienveillant qui fait grandir, qui fait exister ? Sommes-nous appelés à être ses mains qui posent les gestes de la tendresse et du réconfort ? Ou encore ces pieds qui signifient le service du frère ? Sommes-nous appelés à être cette bouche qui offre des paroles de douceur, de bienveillance, de réconfort ? Oui ensemble, frères et sœurs, nous sommes les membres du corps vivant du Christ au cœur du monde. Un corps vivifié aussi par l’écoute de la Parole, une Parole qui transforme de l’intérieur, une Parole qui s’ajuste progressivement au projet d’amour sur chacun et chacune d’entre nous, une Parole qui nous rend capables de devenir des témoins, comme Bernadette, de proposer la foi, non pas de faire croire -ce n’est pas de notre ressort- mais au moins de le dire et peut-être, plus encore, de le vivre comme un vivant témoignage. Frères et sœurs, nous qui sommes membres de cette église vivante, nous, qui répondons à l’invitation de la Vierge à bâtir ensemble, rappelons-nous que nous avons reçu des dons, chacun pour le bien de tous, que nous avons tous une vocation et que nul n’est si pauvre qu’il n’ait rien à donner, ni si riche qu’il n’ait rien à recevoir
AMEN
Abbé Pascal ROGER, doyen d’Arlon
